Vous n’avez jamais / ou peu collaboré avec des acteurs hors du champs des mathématiques ? Vous êtes curieux·se, vous voulez découvrir sans pression l'univers des collaborations Mathématiques - Autres disciplines ? Vous vous intéressez aux enjeux sociétaux en général et à celui de l’eau en particulier ? Vous êtes les bienvenu·e·s à la rencontre thématique Mathématiques & Eau organisée par l'Agence Lebesgue le 17 novembre 2025 de 13h30 – 15h30 dans la salle 014 (Bât. 22) du campus de Beaulieu (Rennes).
Doctorant·e·s, chercheur·euse·s confirmé·e·s ou jeunes, déjà engagé·e·s en collaboration ou pas, l'Agence Lebesgue vous propose le temps de cette rencontre d'aborder des leviers qu'offrent les mathématiques face aux défis liés à l’eau mais aussi les questions humaines qui rendent possibles ces collaborations scientifiques.
Deux retours d’expériences de collaborations poseront le décor de cette rencontre. D’abord, Victor Bertret (Purecontrol) présentera une approche de programmation dynamique stochastique pour piloter l’aération en station d’épuration et abordera son expérience entant que doctorant CIFRE. Ensuite, Céline Roose-Amsaleg (ECOBIO) présentera une collaboration à l’interface écologie, virologie et mathématiques, qui explore la circulation des virus dans les eaux fluviales de baignade en combinant analyses statistiques et modélisation déterministe. Dans ces deux projets, la méthode mathématique rencontre un enjeu sociétal immédiat.
Après présentation de ces exemples, un atelier collaboratif au format (World Café) sera mené autour d'une thématique réelle portée par Yves Méheust (Géosciences Rennes) : "upscaling'' des processus de transport dans les milieux poreux, et de complexité topologique des écoulements lents dans ces milieux. Cet atelier permettra d'échanger / d'esquisser des pistes de résolution autour d'une question de recherche issue d'une autre discipline.
Nous espérons vous croiser nombreux à cette rencontre pour écouter, questionner, tester des idées ; et si une étincelle prenait, amorcer la suite.
13h30-13h50 : Retour d’expérience 1 - Victor Bertret (Purecontrol)
Titre: Piloter l'aération en environnement incertain : une approche par Programmation Dynamique Stochastique
Résumé : L'optimisation du pilotage de l'aération dans les stations d'épuration (STEP) se heurte à des dynamiques non-linéaires, des observations partielles et des perturbations non mesurées, telle la variabilité de la charge polluante en entrée. Ces travaux ont consisté à développer une chaîne méthodologique complète, allant de la modélisation prédictive à la commande optimale, spécifiquement adaptée à ce contexte d'incertitudes. La démarche repose sur l'implémentation d'un cadre stochastique en espace d'état pour estimer conjointement les états latents et les incertitudes. Différentes familles de modèles (physiques, non-paramétriques) ont été évaluées, puis intégrées dans des stratégies de contrôle avancé, notamment la Programmation Dynamique Stochastique (PDS), afin de valider leur apport non pas sur la justesse statistique, mais sur la valeur opérationnelle. Ces travaux ont été menés en convention CIFRE au sein de la société Purecontrol, garantissant une adéquation constante entre la recherche fondamentale et les contraintes opérationnelles. Les impératifs industriels, notamment la nécessité d'une charge de calcul en ligne quasi-nulle, ont directement orienté les choix méthodologiques. Cette collaboration a favorisé la sélection de solutions robustes (telle la PDS, dont le calcul intensif est déporté hors-ligne) plutôt que d'architectures théoriquement optimales mais non déployables.
13h50-14h10 : Retour d’expérience 2 - Céline Roose-Amsaleg (ECOBIO)
Titre : A l’interface des mathématiques et de la virologie : comment prédire la circulation des virus dans les eaux fluviales de baignade ?
Résumé : Les eaux sont une voie avérée d’infections, notamment virales. A ce jour, la seule réglementation sur la qualité des eaux de baignade (European directive 2006/7/EC) recommande des mesures de concentrations en bactéries fécales. Or, ces dernières ne sont pas corrélées à la présence des virus pathogènes de l’homme. Après la tenue des jeux olympiques et paralympiques, la Seine va s’ouvrir à un plus large public : ses riverains. Si certaines études commencent à mesurer des concentrations de certains virus en Seine, aucune ne s’est encore intéressée ni à leur représentativité de la qualité fluviale ni à leur dynamique fluviale. Dans quelle mesure ces quelques virus représentent-ils la qualité virales des eaux ? Que devient un virus lorsqu’il atteint le fleuve ? Comment y est-il transporté ? L’objectif est d’élucider quels virus il faut pertinemment cibler et de comprendre leur dynamique virale dans le fleuve. Cela consiste à mener une analyse statistique descriptive des données acquises puis à développer un modèle mathématique déterministe intégrant les apports de virus, ainsi que certaines de leurs propriétés en fonction des conditions environnementales.
14h10-14h30 : Présentation du sujet - Yves Méheust (Géosciences Rennes)
Titre : "Upscaling'' des processus de transport dans les milieux poreux, et de complexité topologique des écoulements lents dans ces milieux
Résumé : Les processus physico-chimiques, notamment les processus de transport auxquels je m'intéresse, sont en général bien décrits théoriquement à l'échelle hydrodynamique (dite "porale" dans le vocabulaire de la communauté des milieux poreux), mais il est difficile d'obtenir des prédictions (par exemple numériques) à une échelle macroscopique pertinente (échelle macroscopique ou "du terrain") du fait de la trop grande séparation entre ces échelles. On essaie donc d'obtenir une description théorique à une échelle mésoscopique, dite échelle "de Darcy" ou "du milieu continu", qui est significativement plus grande que l'échelle des cavités/pores du milieu poreux. La loi de Darcy, qui décrit la dynamique des écoulements permanents à cette échelle du milieu continu, a été découverte de manière expérimentale au milieu du 19ème siècle, et est facilement dérivée pour les écoulements à bas nombre de Reynolds dans des géométries simples, mais il a fallu attendre 1987 pour qu'elle soit démontrée théoriquement dans le cas général, par moyennage volumique de l'équation de Stokes. Cette loi de Darcy a permis le développement d'un corpus théorique pour "l'hydrogéologie", qui décrit les écoulements souterrains. On a ainsi obtenu des prédictions analytiques pour ces écoulements à l'échelle d'un site hydrogéologique, dans des configurations simples (milieux homogènes, conditions aux limites simples). Dans des cas plus proches de la complexité du milieu naturel, cela a aussi permis la modélisation numérique. Néanmoins, ce changement d'échelle dans la description théorique se fait au pris d'une perte d'information sur la cinématique de l'eau, et sur sa déformation dans l'espace poral. La déformation croît en fait exponentiellement, du fait de la topologie particulière des écoulements en milieux poreux. Cette propriété, qui est la signature d'un processus chaotique, impacte fortement le mélange des espèces chimiques dissoutes dans l'eau.
14h30-15h30 : Atelier collaboratif - Yves Méheust (Géosciences Rennes)
Heure : 13h30 – 15h30
Public : Chercheurs, chercheuses et doctorants en Mathématiques
Format : Présentations & atelier participatif
L’inscription est recommandée pour des raisons logistiques.